Sémiologie de la conjonctive

0
15593

Nous allons parler dans cet articles de la sémiologie de la conjonctive.

Troubles fonctionnels

Les affections de la conjonctive se manifestent par des signes fonctionnels :

  • cuissons
  • démangeaisons
  • sensation de corps étranger
  • photophobie
  • douleurs
  • une gêne visuelle due à l’accumulation des sécrétions sur la cornée

Mais elles ne s’accompagnent d’aucune baisse visuelle. C’est là un signe de valeur dans les cas fréquents où une affection de l’iris se manifeste au début par une hyperhémie conjonctivale.

La baisse visuelle doit faire éliminer une affection purement conjonctivale et attirer l’attention sur une afection du tractus uvéal.

Signes physiques

Anémie

La conjonctive est pâle dans les états anémiques.

Hyperhémie

La conjonctive d’hyperhémie facilement sous l’influence du simple retournement de la paupière ou par la présence d’un corps étranger. L’hyperhémie diffuse est simplement un signe d’irritation de la conjonctive ; elle ne suffit pas à elle seule à justifier le diagnostic de conjonctivite.

C’est une simple dilatation des vaisseaux sanguins normaux de la conjonctive ; elle peut être cependant le premier signe d’une conjonctive.

L’hyperhémie de la conjonctive, signe de conjonctivite, ne doit pas être confondue avec l’injection ciliaire, signe d’irido-cyclite.

L’hyperhémie conjonctivale prédomine sur la conjonctive palpébrale et va s’atténuant sur la conjonctive bulbaire ; la rougeur est toujours plus atténuée au voisinage du limbe.

L’examen à la lampe à fente montre que seuls les vaisseaux de la conjonctive sont injectés, nettement visibles.

L’injection ciliaire, au contraire, prédomine au voisinage immédiat du limbe. Elle peut se montrer isolée, sous forme d’un anneau de coloration rose-mauve, flou-pâle, en bordure immédiate du limbe. Elle est souvent associée à l’injection conjonctivale.

Dans ce cas, à côté de la rougeur conjonctivale qui s’atténue à partir des culs-de-sac, il existe ne même temps une rougeur plus vive au voisinage immédiat du limbe.

La lampe à fente permet de voir, à côté des vaisseaux conjonctivaux dilatés, les vaisseaux venus de la profondeur, à petite distances du limbe, s’épanouir en surface, s’anastomoser avec les vaisseaux conjonctivaux pour constituer le réseau en arcades du limbe et envoyer des branches récurrentes dans le plan de la conjonctive.

Une vive hyperhémie en résulte : cercle périkératique.

Dilatation des vaisseaux de la conjonctive : cyanose

Il ne s’agit pas là d’une rougeur diffuse mais d’une dilatation des vaisseaux visibles de la conjonctive. Ce n’est pas un signe d’irritation ni d’inflammation, c’est un signe de stase.

  • on l’observe dans la maladie bleue où les vaisseaux dilatés confèrent à la conjonctive tarsale une coloration violacée
  • on l’observe comme signe d’un exophtalmos pulsatile ; les veines conjonctivales sont alors dilatées et tortueuses

La conjonctive normale, transparente, laisse voir les vaisseaux du plan de l’épisclère et du plan de la sclérotique.

On voit ainsi, sur le plan de la sclérotique, des vaisseaux parfois extrêmement sinueux et tortueux qui se perdent brusquement dans un trou de la sclérotique, à distance du limbe. Il ne faut pas prendre ces vaisseaux pour des vaisseaux de la conjonctive.

L’examen de ces vaisseaux, vus à travers la conjonctive, ne présente pas moins un très grand intérêt ; leur aspect présente une valeur sémiologique de premier plan dans le diagnostic du glaucome chronique, d’une tumeur intra-oculaire.

Chémosis

L’oedème de la conjonctive se traduit par une saillie de la conjonctive, plus marquée au limbe où elle dessine un bourrelet translucide, rosé ou rouge vif, appelé chémosis. Le chémosis peut être extrêmement prononcé.

Il fait alors hernie à travers la fente palpébrale sous forme d’un boudin rosé vitreux ; il peut masquer en partie la cornée qui est alors visible comme au fond d’un cratère. Il peut être limité à la partie externe de la conjonctive, dans le cas de dacryo-adénite, l’orgelet voisin de la commissure.

  • il peut être un signe de conjonctive ; dans ce cas, il est rarement très accusé, sauf dans le cas de conjonctive blennorragique
  • il s’observe très souvent dans les traumatismes, parfois extrêmement marqué s’il y a hématome de l’orbite
  • il est un signe très important dans le cas de ténonite,d’ophtalmie métastatique, le sclérite postérieure, de phlegmon de l’orbite, de thrombose des veines orbitaires ou du sinus caverneux
  • il peut s’observer dans les oedèmes généralisés

Ecchymose conjonctivale et sous-conjonctivale

Les hémorragies de la conjonctive s’observent dans les circonstances diverses :

  • des suffusions hémorragiques discrètes s’observent souvent dans la conjonctivite de Weeks
  • à l’occasion d’un traumatisme : une hémorragie sous-conjonctivale circonscrite peut être le signe d’une contusion locale du globe par un corps vulnérant tel qu’un boulon ; mais elle peut être le signe d’une plaie pénétrante avec corps étranger intra-oculaire ; elle peut servir à découvrir l’orifice d’entrée
  • dans le cas de traumatisme crânien, une hémorragie sous-conjonctivale, apparaissent après quelques jours, passe pour être un signe de fracture du crâne ; en réalité, elle n’a aucune signification ; elle provient d’une hémorragie du tissu cellulaire de l’orbite, par ébranlement ou contusion ; elle ne doit pas être interprétée comme signe de fracture de la base du crâne
  • une ecchymose sous-conjonctivale se voit souvent à l’occasion d’un écrasement thoracique
  • une hémorragie sous-conjonctivale spontanée s’observe assez souvent chez l’enfant atteint de coqueluche, à l’occasion des quintes de toux
  • chez les sujets âgés, une hémorragie sous-conjonctivale rouge vif apparaît un matin, au réveil. Elle est considérée habituellement comme un signe fâcheux d’hypertension artérielle ; en réalité, une telle hémorragie de la conjonctive, qui toujours affole le malade et son entourage, n’a par elle-même aucune signification fâcheuse

Des hémorragies

Des hémorragies peuvent suinter la conjonctive même et donner lieu aux « larmes de sang ». On les observe dans :

  • l’hémophilie
  • chez les hystériques
  • parfois à l’occasion des règles
  • elles peuvent être en relation avec l’angiomatose familiale de Rendu-osler ; on découvre alors sur la conjonctive un petit glomérule angiomateux

L’émphysème

L’emphysème de la conjonctive est le gonflement de la conjonctive par des bulles d’air. Il peut apparaître subitement à la suite d’un traumatisme intéressant les sinus péri-orbitaires, à l’occasion du moucher.

Il peut être provoqué par le sujet lui-même, dans un but de tromperie.

La sécrétion conjonctivale

La sécrétion conjonctivale est le signe caractéristique de toute conjonctive :

  • sécrétion muqueuse, dans la conjonctivite catarrhale, sous forme de longs filaments blancs
  • sécrétion purulente, dans les conjonctivites purulentes
  • sécrétion gluante
  • une sécrétion tenace, que rien n’explique apparemment, peut être le signe d’un corps étranger méconnu, logé dans la partie supéro-interne du fornix, depuis des semaines ou des moins

Fausses membranes

Elles se montrent dans certaines formes de conjonctivite, sous forme d’un voile opalescent ; elles sont dues à la présence de fibrine et s’enlèvent facilement mais se reproduisent.

Membranes

Conjonctivite membraneuse
Conjonctivite membraneuse

Dans d’autres cas, ce sont des vraies membranes. Elles sont dues à une nécrose de l’épithélium. La membrane fait corps avec les tissus sous-jacents. Elle ne se laisse détacher que difficilement.

L’épithélium est détruit ; le tissu sous-jacent est un tissu de granulations.

Follicules

Chez l’enfant adénoïdien, on observe fréquemment dans le cul-de-sac inférieur, le long des plis, au voisinage de l’angle externe, des follicules :

  • opalescents saillants
  • translucides
  • d’un jaune verdâtre

C’est la folliculose conjonctivale.

Le follicule est la manifestation d’une hyperplasie des follicules lymphoïdes normaux situés sous l’épithélium. C’est un nodule hémisphérique, avasculaire au centre, vascularisé par la périphérie, saillant sous la conjonctive.

Les follicules s’observent de façon très fréquente, comme signe caractéristique de certaines conjonctivites dites « folliculaires » et comme signe capital du trachome.

Papilles

L’hyperplasie des papilles est extrêmement fréquente dans toute conjonctivite de quelque durée. Dans toute conjonctivite, à la phase d’hyperhémie, l’examen à la lampe à fente met en évidence les vaisseaux invisibles à l’état normal.

On entrevoit alors, dans la conjonctive palpébrale devenue moins transparente, des vaisseaux orientés perpendiculairement au bord libre de la paupière.

Une mosaïque de figures polygonales se dessine en surface de la conjonctive ; ce sont les ramifications terminales des vaisseaux dans les papilles du derme ; elles représentent l’ébauche des papilles.

Les papilles hyperplasiées se montrent à la lampe à fente avec l’aspect caractéristique de « grains de grenade », dû au bouquet vasculaire central de la papille.

Tassées les unes contre les autres par pression réciproque, les papilles réalisent une mosaïque caractéristique. L’hyperplasie des papilles peut aboutir à la formation de saillie exubérantes « en crête de coq » saignant facilement, à des tumeurs inflammatoires diffuses ou circonscrites.

Elles donnent aux épithéliomas papillaires l’aspect en chou-fleur qui les caractérise. L’aspect « en pavage », en mosaïque, de la conjonctivite printanière est due à l’hyperplasie du derme associée à l’hyperplasie papillaire.

Concrétions

On observe souvent, sur la conjonctive tarsale inférieure, des concrétions blanches qui siègent dans les cryptes de Henle. Elles peuvent devenir de véritables calculs susceptibles d’ulcérer la cornée.

  • on observe aussi des calculs formés dans les glandes de Méibomius ; ils peuvent s’entourer d’une zone inflammatoire et ulcérer la cornée
  • dans le cul-de-sac inférieur, chez les sujets âgés, on remarque souvent des formation kystiques où se trouvent logés des grumeaux blancs sphériques
  • enfin, il n’est pas rare de voir, incluses dans le tarse, à la paupière supérieure, des concrétions blanches ou grisâtres, qui sont le reliquat de follicules trachomateux anciens, spontanément guéris

Pigmentation

La présence de pigment brunâtre au voisinage du limbe est un état normal chez les sujets pigmentés. Le pigment est accumulé autour des vaisseaux ; il respecte le réseau lymphatique, qui est ainsi mis en évidence.

  • la mélanose de la conjonctive est une pigmentation anormale, irrégulièrement répartie au voisinage de la cornée
  • dans la maladie d’Addison, le pigment s’accumulent d’abord autour des boyaux lymphatique ; la coloration brunâtre s’installe dans l’aire de la fente palpébrale
  • le noevus pigmenté, formé de cellules naeviques, a déjà les caractères d’une petite tumeur.
  • l’argyrose de la conjonctive est une accumulation de fines particules poudreuses d’argent ; elle donne à l’ensemble de la conjonctive une coloration mine de plomb, ardoisée :
    • on l’observe à la suite d’instillations longtemps répétées d’argyrol
    • on l’observe également associée à une coloration ardoisée des téguments, à la suite d’ingestion de pilules de nitrate d’argent dans un but thérapeutique

La coloration jaune de la conjonctive, chez les ictériques, est bien connue ; les simulateurs la réalisent en avalant, enveloppée dans du papier à cigarettes, de la poudre d’acide picrique

Le xérosis

C’est une métaplasie de la conjonctive dont l’épithélium se transforme en un épithélium pavimenteux. Il pend l’aspect opaque, plissé de l’épiderme et se couvre d’une sécrétion sébacée. Sous le nom de « tache de Bitot », le xérosis est le signe d’une avitaminose A.

Le xérosis peut envahir toute la conjonctive comme aboutissement terminal d’inflammations chroniques.

La nécrose de la conjonctive

Elle s’observe dans les brûlures graves par caustiques.

  • elles se manifeste d’abord par l’aspect pâle, lavé de la conjonctive et par son insensibilité
  • à la lampe à fente, les vaisseaux apparaissent noirâtres ; le cours du sang y est arrêté, ségmenté

Secondairement, une cicatrice s’installe, entraînant un symblépharon ou un ankyloblépharon.

Angiomatose de la conjonctive palpébrale

  • dans la maladie de Rendu-Osler
  • dans l’angiomatose héréditaire et familiale, on observe parfois des larmes de sang ; elles ont pour origine un minuscule angiome de la conjonctive palpébrale, tout à fait pathognomonique de la maladie

LAISSER UN COMMENTAIRE

Please enter your comment!
Please enter your name here