C’est une conjonctivite contagieuses survenant sous forme d’épidémie. La contagion se voit dans les écoles, les asiles, les crèches, où elle atteint les enfants sous une forme souvent bénigne et négligée, alors que la conjonctive se manifeste chez l’adulte sous une forme plus sévère.
Symptômes
Les deux yeux sont toujours atteints, à intervalle de 2 ou 3 jours, temps d’incubation. Le premier signe est l’agglutination des cils au réveil. Des concrétions jaunâtres occupent la base des cils et une masse jaunâtre, gluante, occupe l’angle interne.
Les paupières sont oedèmatiées. Lorsqu’on les ouvre, on donne issue à une sécrétion muco-purulente jaunâtre, filante. Les filaments enlevés se reproduisent en quelques instants.
La conjonctive bulbaire apparaît d’un rose vif uniforme : « pink eye », et la rougeur prédomine dans le segment supérieur. Sur cette teinte uniforme tranchent de petites hémorragies, sous forme de piqueté ou de suffusions.
Dans les cas graves, l’injection périkératique, avec la dilatation des vaisseaux épiscléraux, rappelle l’aspect d’une sclérite diffuse. Les phlyctènes ne sont pas exceptionnelles.
La conjonctive des culs-de-sac est rouge. Dans le cul-de-sac inférieur s’étalent des filaments de muco-pus. Si on reverse la paupière supérieure, la conjonctive tarsale apparaît hyperhémiée mais lisse, couverte de suffusions hémorragiques.
L’examen à la lampe à fente montre, au voisinage du bord supérieur du tarse, que le réseau vasculaire normal est masqué par une afflorescence de touffes vasculaires venues de la profondeur et épanouies en surface.
Les troubles subjectifs, peu marqués chez l’enfant, consistent surtout en une sensation de chaleur, de « cuisson », de corps étranger, qui pousse les malades à se frotter constamment les yeux. Les photophobie est parfois intense.
Dans certaines épidémies, une fièvre légère, la céphalée, la courbature générale, la douleur péri-orbitaire rappellent le début d’une grippe.
La présence d’un ganglion pré-auriculaire s’observe dans quelques épidémies. L’affection atteint sont acmé en 4 ou 5 jours. Après une semaine, la sécrétion se tarit ; la rougeur diminue ; l’agglutination des cils persiste encore pendant quelques semaines, ainsi que l’érythème des paupières;
L’affection, parfois réduite chez l’enfant à un peu de rougeur accompagnée d’agglutination des cils, attribuée à un simple courant d’air et rapidement guérie, peut cependant trainer pendant quelques mois, favorisant ainsi la contagion.
Ces formes apparemment bénignes sont les plus dangereuses au point de vue de la diffusion de la conjonctive ; c’est ainsi que les enfants sont contaminés à l’école ou dans la famille.
Chez l’adulte, on observe des formes plus sévères qui, par l’importance des troubles fonctionnels : douleurs, abondance de la sécrétion muco-purulente, chémosis, oedèm des paupières, peuvent simuler une conjonctive gonococcique.
Des complications peuvent se manifester sur la cornée, sous forme de petits infiltrats marginaux auxquels succèdent parfois des ulcères.
Il n’est pas rare qu’un cercle périkératique vienne témoigner de la réaction ciliaire. L’enduit pseudo-membraneux qui tapisse la conjonctive tarsale se reproduit parfois au cours des premiers jours, faisant penser à une conjonctivite diphtérique.
Certaines épidémies, en Tunisie, ont été marquées par de graves manifestations cornéennes, suivies de perforation, le plus souvent centrale.
En Afrique du Nord, la conjonctivite à bacille de Weeks favorise l’extension du trachome.
Diagnostic
Il est facile en cas d’épidémie ou lorsqu’elle survient sous forme d’épidémie, associée au coryza chez les enfants, peut simuler la conjonctivite à bacille de Weeks.
Elle se présente comme elle avec l’allure d’une conjonctivite aiguë très inflammatoire, avec gonglement de la conjonctive et de paupières.
La conjonctivite est de coloration rosée ; des hémorragies se voient, spécialement sur la conjonctive bulbaire, en regardant du bord oedèmauteux de la paupière supérieure. Elle s’accompagne assez souvent de réaction ciliaire avec cercle périkératique, parfois d’une iritis avec hypopyon.
Le diagnostic ne peut être tranché, dans les cas difficiles, que par la mise en évidence du bacille de Weeks dans la sécrétion conjonctivale.
Sur les frottis, colorés par la fuschine de Ziehl diluée au dixième, il apparaît sous forme d’un petit bacille fin, rigide, disposé en amas, d’abord extra-cellulaire puis intra-cellulaire, dans les cellules épithéliales desquamées.
Il cultive mieux sur les milieux additionnés de sang où il donne de petites colonies incolores. C’est un microbe très fragile, tué par refroidissement à 30°. Le simple savonnage des mains suffit à éviter la dissémination de l’infection.
Traitement
Le nitrate d’argent à 1% utilisé en instillations est le médicament de choix.
- il est bon de faire précéder l’instillation d’un lavage au sérum physiologique ou au permanganate de potasse à 1/5000
- on peut alterner avec des instillations de sulfate de zinc à 1%
- le collyre à la pénicilline est appelé à supplanter les autres traitements
- le traitement doit être poursuivi pendant quelques semaines après la guérison apparente, sous forme d’instillations d’argyrol à 5% ou 10%
- le port de verres teintés peut être utile en cas de photophobie intense. Mais aucun pansement occlusif ne doit être appliqué sur l’oeil.
Prophylaxie
Le dépistage des cas frustes, l’isolement des enfants atteints, sont les mesures qui s’imposent pour mettre fin rapidement à une épidémie. Le lavage des mains, pour les personnes appelées à soigner l’enfant, suffit à éviter la contamination.
Dans notre pays, la conjonctivite à bacille de Weeks est une affection bénigne qui ne menace pas la vision.