Il nous est rarement donné d’observer le trachome à la période de début, dans nos pays du moins.
Sommaire
Stade de début : trachome incipiens
Ce n’est guère qu’à l’examen « systématique » des enfants des écoles, en Afrique du Nord, qu’il peut être donné de découvrir un cas de trachome au début. Le malade n’éprouve en effet à peu près aucun trouble, si ce n’est un léger larmoiement, une impression de lourdeur des paupières.
Lésions de la conjonctive
Lorsqu’on renverse la paupière supérieure, étalant la région du tarse, on voit que la conjonctive a perdu l’aspect :
- lisse
- brillant
- de coloration jaune chamois
Elle apparaît légèrement :
- hyperhémiée
- épaissie
Elle a perdu sa transparence.
On croit deviner, par transparence, la présence de follicules branchâtes, qui tranchent sur le fond rose hyperhémié de la conjonctive.
Mais seul l’examen à la lampe à fente permet, à ce stade, de déceler les signes de certitude du trachome. Il faut les rechercher au voisinage du bord supérieur du tarse où les follicules sont localisés au début.
Le follicule trachomateux apparaît inclus dans la conjonctive, sous forme d’une petite saillie hémisphérique :
- blanchâtre
- opaline
- avasculaire
- entourée par les bouquets vasculaires visibles des papilles
Lésions de la cornée
A ce stade de début déjà, l’examen à la lampe à fente de la cornée, au voisinage immédiat du limbe, permet de découvrir les fines arcades vasculaires caractéristiques du pannus tenuis, à son extrême début.
Période d’état : trachome floride
Nous observons de temps en temps la trachome floride, dans toute sa pureté, chez :
- les enfants nés n France de parents trachomateux
- plus rarement chez les jeunes travailleurs nord-africains.
Les troubles subjectifs sont alors très accusés :
- photophobie
- larmoiement intense
- impression de gêne sous les paupières
L’aspect du malade est caractéristique :
- les paupières supérieures, lourdes
- tombantes
- avec les cils abaissés au-devant de la fente palpébrale, donnent au malade un air un peu « endormi »
Lésions de la conjonctive
Sur la paupière supérieure éversée, examinée à l’oeil nu, les signes sont caractéristiques :
- la conjonctive tarsienne hyperhémiée
- épaissie
- de petites élevures opalines, gélatiniformes, qui couvrent la conjonctive du tarse « en frai de grenouille »
- profil au niveau du bord convexe du tarse
Les granulations occupent avec élection la conjonctive tarsienne de la paupière supérieure, mais elles débordent souvent au delà du tarse, sur la conjonctive du cul-de-sac supérieur et de la région voisine du repli semi-lunaire, où elles affectent un caractère exubérant.
Il n’est pas rare d’observer les follicules trachomateux sur la conjonctive de la paupière inférieure qu’ils peuvent couvrir complètement.
L’examen à la lampe à fente permet de reconnaître nettement les follicules trachomateux caractérisés, au milieu des papilles qui les entourent de leurs bouquet vasculaire, par leur forme hémisphérique, leur coloration pâle blanchâtre, l’absence de vaisseaux centraux.
Elle permet surtout de mettre en évidence les follicules aberrants épars sur la conjonctive au delà du tarse. Les granulations trachomateuses ont été comparées à :
- des grains de sagou cuit
- des grains de semoule
Sous la pression de l’ongle ou même tout simplement au cours de l’éversion de la paupière, on les voit éclater, laissant déposer à la surface de la conjonctive une masse gélatiniforme ou fluide. Cet éclatement de la granulation est un signe caractéristique du trachome.
Lésions de la cornée
Les lésions de la cornée ne sont pas, comme on l’a prétendu, secondaires aux altérations de la conjonctive palpébrale et provoquées par frottement de la paupière ; elles sont contemporaines des lésions de la conjonctive et, comme elles, symptomatiques du processus trachomateux en évolution.
On les désigne sous le nom de « pannus trachomateux ».
A l’oeil nu, l’atteinte de la cornée se manifeste d’abord par l’aspect flou du limbe à la partie supérieure de la cornée ; c’est le « flou limbique ».
Mais déjà au stade de début du trachome, l’examen à la lampe à fente décèle en cet endroit l’envahissement de la cornée par les vaisseaux.
C’est d’abord le « pannus tenuis ». On voit les vaisseaux, partant de la conjonctive, envahir les couches superficielles de la cornée sous forme d’un réseau extrêmement élégant d’anses vasculaires épanouies en arcades régulières.
Au stade de trachome floride, le pannus s’étend à la partie supérieure de la cornée et s’avance jusqu’au-devant de l’aire pupillaire sous forme d’un voile translucide formé de longues arcades vasculaires « tombant en pluie » verticalement devant la cornée.
C’est le « voile vasculo-granuleux » formé non seulement de vaisseaux mais aussi d’infiltrats et même de follicules trachomateux.
ce voile occupe la moitié supérieure de la cornée ; il est limité en bas par une ligne festonnée élégante, bordée par les plus fines arcades vasculaires. Souvent il entoure toute la partie inférieure de la cornée d’un mince voile fermé d’arcades vasculaires.
Au limbe même, à la base de voile vasculo-granuleux, le flou limbique a fait place à une infiltration est due à la présence de :
- follicules trachomanteux justa-posés
- translucides
- de coloration jaune verdâtre
Ils dessinent au limbe « un diadème de perle ». Ce sont les rosettes du trachome » des ophtalmologistes anglais qui ont observé le trachome en Égypte. A leur place persiste une petite fossette : « fossettes marginales de Herbert », « ocelles limbiques » des français.
Les follicules, au limbe, prennent parfois un aspect exubérant décrit par les anciens auteurs sous le nom de « pannus sarcomateux » ou crêpe trachomateuse. Cette exubérance des follicules s’observe à la phase de trachome floride.
L’envahissement vasculaire de la cornée ne se limite pas à la partie supérieure voisine du limbe ; dans les formes graves, qui s’accompagnent parfois de réaction ciliaire, les vaisseaux s’entre-croisent en tous sens dans les couches superficielles de a cornée.
Il n’est pas rare que des follicules soient épars dans les mailles de ce réseau vasculaire, en plein centre de la cornée ; ils laissent, en se cicatrisant, une facette plane.
Stade cicatriciel
A ce stade, le malade se présente pour des complications cicatricielles, en général pour un trichiasis.
Lésions de la conjonctive
Lorsque les granulations sont évacuées, spontanément ou sous l’influence du traitement, un tissu de cicatrice comble la perte de substance. Ainsi, à la phase de guérison, des travées cicatricielles blanchâtres, nacrées, se dessiner à la surface de la conjonctive.
L’aspect du trachome cicatriciel est caractéristique : le conjonctive de la paupière supérieure est :
- blanche
- lavée
- lisse
- un peu terne
- on n’y observe plus aucune élevure.
Un sillon linéaire blanchâtre est creusé transversalement dans le tarse, parallèlement au bord libre et à petite distance de lui. C’est la « ligne d’Arlt », la « cassure de Greef ».
Lorsque le trachome est mal cicatrisé, n’ayant jamais été traité, on observe, sur la conjonctive tarsienne, à côté de tractus cicatriciels blanchâtres, étoilés, des îlots d’hyperplasie papillaire rouge vif, entre lesquels persistent des follicules encore en évolution ou des follicules rétractés, inclus sous l’épithélium,blancs et apparemment calcifiés ; ils forment de véritables concrétions.
Lésion de la cornée
A la phase de trachome cicatriciel, la cornée demeure très altérée : elle peut revêtir l’aspect de « cornée à facettes » qui l’a fait comparer à un miroir aux alouettes.
Les facettes sont le reliquat de follicules trachomateux, d’infiltrats nummulaires qui occupaient le voile vasculo-granuleux. Le voile vasculaire lui-même ne disparaît pas ; il persiste indéfiniment, même après guérison du trachome ; les blanches vasculaires deviennent simplement plus grêles.